La lecture de ce témoignage est très révélatrice des difficultés rencontrées dans le dépistage et la prise en charge des apnées du sommeil chez l’enfant. Explications avec le Dr Madiha Ellaffi, pneumo-allergologue, spécialisée dans le sommeil.
Votre première réaction ?
Dr Madiha Ellaffi : Les signes de l’apnée du sommeil chez les enfants sont différents de chez l’adulte et peuvent varier d’un enfant à l’autre : fatigue, difficultés d’apprentissage et de concentration à l’école, isolement social, variations d’humeur, ronflements bruyants etc.
Malheureusement, le manque de connaissance de ces derniers conduit trop souvent à des erreurs de diagnostic (enfant hyperactif, troubles du comportement) et à une mauvaise orientation dans le parcours de soins. Trouver une réponse devient ainsi souvent un réel « parcours du combattant » pour les parents.
Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil chez l’enfant est la forme avancée de la maladie. Non prise en charge précocement, elle peut fortement impacter sa santé et son développement.
Des solutions existent !
Dr Madiha Ellaffi : En effet, des solutions existent pour traiter ce trouble durant l’enfance et éviter qu’il ne réapparaisse à l’âge adulte.
Ces difficultés respiratoires sont dues à un manque de place pour le passage de l’air dans le nez et la gorge. Les causes peuvent être multiples mais chacune peut être traitée selon une prise en charge multidisciplinaire et adaptée à l’enfant : chirurgie des amygdales, orthodontie, traitement des allergies, rééducation de la langue… L’objectif est de permettre à l’enfant de respirer normalement la nuit (par le nez !) et de retrouver ainsi un sommeil de qualité.
En savoir plus sur les traitements possibles
La pression positive continue (PPC) : késako ? Dr Madiha Ellaffi : La Pression Positive Continue (PPC) est un traitement mécanique simple et rapidement efficace. Quelle que soit la cause des apnées, la machine pousse de l’air en « pression », permettant de maintenir les voies respiratoires ouvertes, comme lorsque l’on souffle dans un ballon de baudruche pour le faire gonfler. L’objectif est de permettre, pendant le sommeil, à l’air de passer normalement par le nez et la gorge. Beaucoup moins systématique que chez l’adulte, le recours à ce traitement peut être envisagé dans plusieurs situations : – Pour les syndromes les plus sévères – Dans les formes dites modérées mais avec un retentissement clinique sévère (retard de croissance, troubles du comportement, asthme déséquilibré, infections à répétitions, épilepsie, troubles des apprentissages). Le recours à la PPC peut donner le temps aux médecins et aux parents de réfléchir et de programmer d’autres traitements adaptés, en fonction de l’âge et des constats réalisés lors des différents bilans. Ou par exemple lorsque les symptômes réapparaissent après une chirurgie (cette dernière ne traitant souvent qu’une partie de l’obstruction). Les études prouvent en effet que plus de la moitié des enfants opérés des amygdales et/ou des végétations ont un syndrome d’apnée résiduel. Ce traitement permet d’aider l’enfant à mieux dormir, se réveiller reposé, et ainsi de voir diminuer, voire disparaître, les symptômes en journée : moins de fatigue, mois d’agitation, moins de colères, moins d’anxiété, disparition des éventuels maux de tête, amélioration des capacités d’apprentissages, rattrapage de la courbe de croissance si celle-ci avait ralenti, aide à reperdre du poids pour les enfants obèses, diminution des épisodes infectieux, des crises d’asthme, aide à stabiliser une épilepsie etc. Comme pour tout traitement efficace, le traitement par PPC peut présenter des effets secondaires. Certains sont liés à la tolérance au masque : rougeurs de la peau, douleurs aux points d’appui, et, le plus craint, un enfoncement du massif facial en appuyant fort sur des os en croissance. Dans la pratique ceux-ci sont très rares et surtout réversibles à l’arrêt du port du masque. Les fuites et une sécheresse des muqueuses représentent le risque le plus gênant et fréquent. Nous avons la chance en France de disposer de services de prestation à domicile, ce qui permet une mise en place du traitement (à domicile, en hôpital de jour, ou en hospitalisation classique) adaptée à l’âge et aux éventuelles maladies associées de l’enfant. Le suivi des enfants et de leur famille se passe le plus souvent remarquablement bien et permet de coordonner les différents traitements. |
Un message à faire passer ?
Dr Madiha Ellaffi : Le sommeil est un paramètre de santé majeur, quel que soit l’âge de la vie. Durant l’enfance, son rôle est primordial dans le développement et la croissance. Ainsi, au moindre doute, j’encourage à en parler à un médecin et à se poser la question de savoir si l’enfant dort bien. Ne pas hésiter par ailleurs à solliciter plusieurs avis médicaux. Un enfant qui respire bouche ouverte ou ronfle ce n’est pas normal !
Un dépistage précoce des enfants souffrant d’apnées du sommeil pourrait permettre d’en soigner beaucoup. Pour y parvenir, améliorer la formation des professionnels de santé et de la petite enfance face à ce problème de santé publique est selon moi essentiel.
Pour aller plus loin :